Actu

Taux bas d’Alzheimer : les pays avec les incidences les plus faibles

Certains pays affichent une prévalence de la maladie d’Alzheimer bien inférieure à la moyenne mondiale, malgré une population vieillissante. Les écarts dans les taux d’incidence ne s’expliquent pas uniquement par la génétique ou l’accès aux soins.

Les chiffres issus des enquêtes épidémiologiques de ces dernières années réservent quelques surprises : là où l’on attendait une hausse mécanique des cas d’Alzheimer, certains États parviennent à casser cette dynamique. Les raisons ne tiennent pas tant à des secrets médicaux qu’à des choix collectifs, des pratiques sociales et des politiques publiques taillées sur mesure. La société, l’environnement et les habitudes de vie pèsent lourd dans la balance. Des mesures concrètes, des stratégies coordonnées et des cultures qui valorisent la prévention font nettement la différence.

Pourquoi certains pays affichent-ils des taux d’Alzheimer plus faibles ?

Dans le panorama mondial des démences, certains territoires se distinguent par une stabilité, voire une légère baisse de l’incidence de la maladie d’Alzheimer au fil du temps. Les données collectées par différents chercheurs, que ce soit en Europe ou au Canada, montrent que la prévalence de la maladie n’évolue pas de façon uniforme partout. Ni l’âge moyen, ni l’espérance de vie ne suffisent à éclairer le phénomène.

Au Canada, la société Alzheimer observe depuis plusieurs années une courbe qui ne s’emballe pas, malgré le vieillissement de la population. En France, les registres épidémiologiques et les travaux de l’Inserm mettent en lumière une incidence de la démence maladie d’Alzheimer qui reste relativement modérée par rapport à d’autres régions du monde. Plusieurs enquêtes réalisées dans l’ouest de l’Europe aboutissent à la même conclusion : la progression de la prévalence ralentit, alors qu’on pouvait s’attendre à l’inverse avec l’allongement de la vie.

Qu’est-ce qui explique ces écarts ? Plusieurs pistes se dessinent. D’un côté, la gestion plus pointue des facteurs de risque cardiovasculaire. De l’autre, un accès généralisé à l’éducation et à la prévention, ainsi qu’un système de soins capable d’agir en amont. La société Alzheimer Canada insiste d’ailleurs sur la nécessité de surveiller l’évolution des démences apparentées et d’affiner les méthodes de collecte des données pour suivre ces tendances à la baisse.

Facteurs de protection : ce que révèlent les modes de vie et politiques de santé

Plusieurs points communs se dégagent parmi les pays où l’on observe les taux bas d’Alzheimer. Les épidémiologistes identifient trois leviers majeurs : le mode de vie, la réduction des facteurs de risque modifiables et le déploiement de solides politiques publiques de santé.

Pour mieux comprendre ce qui fait la différence, voici quelques axes clés régulièrement mis en avant :

  • La prévention de l’hypertension, du diabète ou du tabac, qui réduit le risque de démence bien au-delà de la simple question génétique.
  • La promotion d’une activité physique régulière et le maintien d’un lien social solide pour éloigner l’isolement, deux axes soutenus par l’Organisation mondiale de la santé.
  • Une alimentation équilibrée, intégrée dans les recommandations officielles et largement relayée par les campagnes de santé publique.

En Europe occidentale, ces éléments se traduisent par des programmes de dépistage précoce, des campagnes d’information sur les facteurs de risque modifiables et une adaptation progressive des systèmes de santé. Les autorités sanitaires privilégient une prise en charge coordonnée, qui combine prévention, accompagnement social et lutte contre la stigmatisation.

L’Organisation mondiale de la santé rappelle que l’action collective doit dépasser le cadre curatif. La lutte contre les maladies neurodégénératives passe aussi par des gestes quotidiens, des choix de société et une mobilisation dès le plus jeune âge, pour limiter le risque de démence et accompagner la transition démographique.

Groupe de seniors jouant à un jeu de société

Suivre les avancées scientifiques pour mieux comprendre et prévenir la maladie

Les études menées dans plusieurs centres européens, Bordeaux, Dijon, Montpellier, affinent chaque année la compréhension des taux bas d’Alzheimer observés dans certains pays. Depuis plus de vingt ans, des cohortes de patients sont suivies pour mieux cerner l’évolution de la prévalence de la maladie et les facteurs susceptibles d’en moduler l’incidence.

Les équipes de l’Inserm, sous la houlette de spécialistes comme Catherine Helmer, Philippe Amouyel ou Sébastien Bozon, publient régulièrement leurs analyses dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire et dans des revues comme Nature Communications. Ces travaux mettent en lumière l’impact de l’environnement, du niveau d’éducation et des politiques de santé publique dans la baisse constatée de l’incidence de la maladie.

À l’international, des organismes tels qu’Alzheimer Disease International et Alzheimer’s Research UK centralisent les résultats d’études menées dans différents pays pour identifier des tendances et comparer les stratégies. Les dernières analyses confirment une stabilisation, voire une diminution de la prévalence dans plusieurs pays européens, y compris la France.

Par exemple, l’équipe bordelaise a mis en évidence une baisse de l’incidence des démences entre 1990 et 2015. En croisant ces résultats avec ceux du Canada, relayés par la Société Alzheimer, l’idée se dessine : les programmes de prévention qui ciblent les facteurs de risque modifiables pourraient avoir un impact réel. Les chercheurs insistent sur l’importance de poursuivre ces études au long cours, seul moyen fiable de démêler les mécanismes derrière la stabilisation, voire la diminution, des taux de maladie d’Alzheimer.

Face à un avenir démographique incertain, certains pays prouvent qu’il est possible de ralentir la progression d’Alzheimer. Au-delà des chiffres, c’est peut-être dans la capacité à agir ensemble, à adapter nos sociétés et à renforcer la prévention, que se dessine la véritable avancée.